Boule dans le ventre ou dans la gorge, légers tremblements... et, toujours, les fameuses palpitations. Nous connaissons tous les symptômes du trac. Il n’existe pas d’enquête très précise sur la question, mais on estime qu’environ une personne sur deux ressent cette pression régulièrement en cas de situation stressante

À une jeune comédienne qui se vantait de ne pas avoir le trac avant de monter en scène, Sarah Bernhardt répondit sèchement : « Ça vous viendra avec le talent ! ». Comme quoi cette appréhension du public est bien inhérente à notre condition humaine, et peut témoigner de véritables qualités. D’autres personnalités étaient connues pour leur crainte de la scène ou des caméras : Frédéric Chopin, Ella Fitzgerald, Jacques Brel ou, dans un autre domaine, Steve Jobs.
Avoir le trac, c’est ressentir un certain stress, ou un stress certain, avant une prestation en public. Les symptômes sont assez classiques : boule dans le ventre ou dans la gorge, légers tremblements des mains ou des jambes à cause des muscles qui se tendent, bouffées de chaleur et, toujours, les fameuses palpitations. Ces sensations, en général légères et passagères, sont plus fortes chez certaines personnes, notamment les plus émotives. Il n’existe pas d’enquête très précise sur la question, mais on estime qu’environ une personne sur deux ressent le trac régulièrement dans les situations qui s’y prêtent.
L’éducation française donne peu l’habitude aux enfants et aux adolescents de parler en public. Les éléments déclencheurs du trac sont principalement le fait de se trouver au centre de l’attention d’un groupe, avec une tâche particulière et pas forcément facile à réaliser, comme un discours, un exercice, un morceau de musique, etc.
Même si ça n’est pas le cas, cette configuration est alors vécue comme une situation d’examen au cours de laquelle le public devient un groupe de juges. S’entrechoquent ainsi deux anticipations négatives : peur de mal faire et peur d’un jugement négatif de l’auditoire. L’appréhension est majorée par le fait que, dans ce type de situation formelle, la communication est unidirectionnelle : vous devez faire votre prestation, tandis que le public ne fait que vous regarder, sans échange et donc sans partage des efforts ni témoignage d’approbation (avant les applaudissements du moins !).
Ces craintes ne sont pas toujours consciemment présentes, et souvent les symptômes physiques du trac surviennent de manière automatique, échappant à toute tentative de raisonnement, comme tous les symptômes de stress.
Le pire, c’est avant !
Le trac s’exprime surtout avant le début de la prestation, dans les minutes ou les heures qui le précèdent. Tout se passe généralement beaucoup mieux si on vous donne la parole tout de suite, sans avoir eu le temps de « cogiter ». En revanche, vous vous souvenez peut-être de l’attente dans le couloir avant de passer votre premier oral du bac, en voyant défiler les camarades qui passaient avant vous, et sortaient de la salle d’examen en affichant une mine variable.
Les sensations sont les mêmes lors d’un tour de table au cours d’une réunion, ou dans l’heure précédant l’entrée en scène pour une représentation de théâtre ou de musique. Le corps s’affole un peu (le ventre, la chaleur, le cœur) et on ne peut rien faire car ce n’est pas encore le moment. Beaucoup de questions tournent alors en boucle dans la tête : « Vais-je être à la hauteur ? », « Comment sera le public ? », « Pourvu que je n’aie pas un trou de mémoire ! », etc. Sans réponse bien sûr puisqu’on n’y est pas encore.
Typiquement, le niveau de trac augmente progressivement jusqu’à atteindre son maximum lors du début de la prestation. Cela peut durer encore quelques minutes, mais rapidement les choses se calment : d’une part l’esprit est concentré sur le travail à réaliser et le corps joue le rôle prévu, donc il ne reste plus beaucoup d’attention à consacrer à autre chose, et d’autre part les questions sans réponses jusqu’à présent s’éteignent d’elles-mêmes. À moins d’une catastrophe, le fait de constater que vous vous en sortez correctement, qu’aucun spectateur ne se lève en vous jetant des tomates (ce qui devient rare de nos jours…), et que vous maîtrisez donc la situation, permet de désamorcer le trac.
Une certaine tension peut durer pendant toute la « séance », témoin d’une vigilance accrue et d’une motivation à bien faire, mais elle n’est en général ni gênante ni vraiment pénible. Et elle se transforme en soulagement, voire en vraie euphorie, quand l’exercice se termine. Ouf, ça n’était que cela ! Mais dommage de devoir passer par ce couloir sombre du trac avant de voir la lumière de la réussite…
Quelques conseils pour gérer le trac tirés des pratiques sophrologiques.
1. Apprenez à utiliser votre respiration comme un calmant naturel
L’avantage de cet anxiolytique est qu’on peut l’avoir toujours sur soi ! Et, ce qui ne gâche rien, il n’a aucun effet secondaire.
L’objectif est de vous concentrer durant deux minutes sur votre respiration, en essayant de la rendre lente et plutôt contrôlée par le « ventre » (les muscles de l’abdomen agissent directement sur le diaphragme et donc les poumons). Inspirez lentement, pas trop profondément, puis prenez bien conscience de l’expiration, en soufflant lentement par le nez ou par la bouche peu ouverte. À chaque expiration, percevez le relâchement des muscles du corps qui l’accompagne. Positionnez une main sur votre ventre pour bien sentir les mouvements de l’abdomen, et les amplifier si besoin. En vous entraînant régulièrement à froid à ce petit exercice, vous pourrez l’appliquer facilement à chaud, notamment dans les phases de préparation et d’attente avant la prise de parole.
2. Visualisez la scène mentalement avant qu’elle ne commence
Concentrez-vous uniquement sur vos propres actions : je dis ceci, je prends cela, je fais ça, je parle à untel, etc. À la manière d’un skieur qui visualise sa descente et chacun des virages les yeux fermés avant de se lancer sur la piste. Cette répétition virtuelle vous rassurera sur votre connaissance du sujet, et vous évitera les pensées parasites stressantes.
3. « Forcez le passage » avec des images positives
Durant l’attente, vous pouvez visualiser un souvenir précis de réussite dans un exercice similaire antérieur, ou les encouragements ou compliments de vos amis. Il ne s’agit pas là de vous convaincre que vous êtes le (ou la) meilleur(e), mais simplement d’occuper le terrain pour chasser la propagande négative de votre anxiété. Comme sur un ordinateur, il n’y a de la place que pour un seul « fond d’écran » dans votre esprit, donc faites en sorte qu’il vous soit favorable. Utilisez les minutes d’attente pour vous créer une image mentale favorable, par exemple en visualisant vos proches vous encourageant et affirmant qu’ils adorent ce que vous faites. Quitte à forcer le trait, il vaut mieux que vous commenciez votre intervention dans un climat intérieur optimiste plutôt que pessimiste.